Quelques précisions utiles en aromathérapie bucco-dentaire (H. LAMENDIN)

Sachant que beaucoup d’huiles essentielles sont falsifiées (coupées avec des composés chimiques, rectifiées ou même synthétiques), des confrères ont demandé des précisions à propos de leurs qualités. En voici donc les principales caractéristiques, données par une personne qualifiée dans le domaine de leur préparation.

LES HUILES ESSENTIELLES (R. WEGRZYN)
Depuis la nuit des temps et jusqu’à nos jours, l’emploi des huiles essentielles n’a cessé d’augmenter. Que ce soit chez les Grecs, les Romains, les Égyptiens ou les Arabes, les vertus «magiques» des huiles essentielles ont eu le même niveau de réputation : propriétés curatives les mettant en bonne place dans les pharmacopées ancestrales, cosmétiques et produits de beauté naturels.
Malheureusement, négligés pendant plusieurs siècles, les pouvoirs de ces huiles, dont certains demeurent encore inconnus de nos jours, n’ont attiré l’attention des botanistes et des chercheurs qu’au milieu du XXe siècle. Ils n’ont estimé la juste valeur de chaque huile essentielle qu’en en découvrant leurs vertus, de façon empirique tout d’aborcl, puis en s’appuyant sur les tech­niques biochimiques et médicales modernes.
Cette partie de la science «verte » qu’est l’extraction des huiles essentielles des plantes aromatiques et médici­nales, fait l’objet de nombreuses recherches aussi bien en Europe qu’aux États-Unis, car il s’est avéré que la médication directe par ces huiles est la voie de guérison pour plusieurs maladies.
De nombreux procédés sont utilisés pour l’extraction d’huiles essentielles. Cette opération délicate consiste à capter les produits les plus fragiles et les plus subtils élaborés par le végétal et ce, sans alté­rer les vertus. La cuticule cireuse des poches épider-miques brisées, l’essence s’échappe et des milliards de molécules se dispersent, s’ionisent et interagissent avec l’eau, l’oxygène, l’ozone et autres éléments constitutifs de l’air ambiant, tout en subissant les rayonnements solaires.
Cette activité se situe directement en aval de la récolte de la plante (qu’il s’agisse de culture ou de cueillette) et vise à extraire, concentrer, puis stabiliser les arômes issus des végétaux, à destination des industries phar­maceutiques, cosmétologiques et agroalimentaires.

La distillation
L’hydrodistillation, méthode la plus archaïque, consiste à charger dans la cuve d’un alambic les substances végé­tales à traiter (fleurs, rameaux, herbes, racines, bois, écorces, graines ou oléorésines) avec une certaine quan­tité d’eau. La vapeur d’eau est produite directement sous la masse végétale, à l’inverse de la distillation où la vapeur est formée indépendamment.
Ce dernier procédé, relativement récent (distillation par entraînement à la vapeur d’eau) apporte une amélioration certaine de la qualité des produits obtenus, en minimisant les altérations hydroliques, particulièrement des esters liés au procédé traditionnel de distillation. Recherche de la qualité
Les huiles essentielles et les essences d’expression sont des produits naturels qui, utilisés à des fins préventives, curatives ou de bien-être, favorisent une profonde «revitalisation» de l’organisme. Mais, à regret, pour de multiples raisons, il n’est pas aisé de produire de véritables huiles essentielles de haute qualité. Les difficultés tien­nent avant tout à la rareté des plantes saines, la cueillette des plantes sauvages demandant beaucoup de temps et une main-d’њuvre coûteuse, les végétaux de culture écologique étant, malgré les efforts des agrobiologistes encore trop peu abondants. Ensuite, la distillation demande, selon l’ancienne tradition, de grandes pré­cautions. Les détartrants chimiques devant, bien entendu, en être absolument bannis.
Seules seront d’authentiques pro­duits de la nature les huiles essen­tielles pouvant se prévaloir d’une triple garantie sur la plante, sur l’ex­traction et sur le produit fini. Aussi, l’honnêteté du maître distillateur doit-elle être complétée par une com­pétence scientifique et technique certaine. L’utilisation des huiles essentielles à des fins médicinales ou hygiéniques ne peut plus, aujourd’hui, au mépris de l’avancée des sciences botanique, chimique et biologique, se fonder sur une quelconque mystique. Or, comme il a été indiqué plus haut, il existe de grandes variations dans les divers composants des huiles essen­tielles. D’autre part, plus grave encore, certaines sont proposées ou prescrites sous leur nom usuel, sans tenir compte des réalités botaniques.

Spécification botanique
L’importance de la connaissance des familles, genres et espèces botaniques est évidente dans le cadre d’une aromathérapie digne de ce nom. L’ignorance de cette réa­lité peut être source de nombreuses difficultés, voire de problèmes sérieux, ainsi que le démontre l’exemple sui­vant. L’essence de sauge qui, vendue sans autre appel­lation, a provoqué des crises d’épilepsie, dont certaines suivies de coma. Car il existe notamment deux espèces de sauge, la sclarée et l’officinale, la seconde étant par­ticulièrement neurotoxique, par voie orale, alors que la première ne l’est pas.

Les garanties
Après la cueillette de plantes rigoureusement sélectionnées et leur minutieuse distillation, ne doit intervenir qu’une simple filtration à la suite de laquelle l’huile essentielle est stockée dans des cuves inaltérables et hermétiquement entreposées dans un local frais. Ces précautions permettent d’éviter l’oxydation et la polymérisation provo­quée par l’air, la lumière ou la chaleur et qui se traduisent par une variation progressive de la couleur et de la fluidité.
Le conditionnement dans des flacons opaques hermé­tiques, est donc nécessaire à la protection parfaite des huiles essentielles, en l’absence de plastique ou de caoutchouc, sur lesquels les substances aromatiques opèrent une micro dissolution.

Les contrôles
L’échantillothèque est l’élément de base nécessaire à la série de contrôles au laboratoire ; elle est réalisée à par­tir d’huiles essentielles prélevées à l’alambic et de plantes botaniquement vérifiées et distillées au laboratoire (alam­bic en verre). Sont effectués des contrôles organoleptiques (couleur, odeur), chomatographique et de conformité aux normes officielles (Afnor, Iso, Pharmacopée française Xe éditions, Pharmacopée européenne).
Les huiles essentielles délivrées en pharmacies répon­dent à ces normes, ce qui est indispensable pour toutes thérapies, surtout internes, mais aussi externes.

Conclusion/b>
Les soins apportés d’un bout à l’autre de la chaîne, de la plante à l’huile essentielle, feront de celle-ci un produit de très haute qualité tant du point de vue physico­chimique que biologique, à savoir: haut potentiel énergétique, protonique, électronique et électromagnétique, ainsi qu’avec une forte activité pharmacolo-gique.
Une certification précise et complète du mode d’extraction et de l’authenticité, pureté et intégralité est fondamentale, pour éviter à l’utilisateur non seulement de n’en recevoir aucun bienfait, mais, à l’inverse, de s’intoxiquer.

Exemple de composition

HE Lavandin type Grosso (normes
Afnor)
constituants en % :

-Limonène: 0,5 à 1,5
-Cinéole 1,8: 4à 7
-Cis béta ocimène : 0,5 à 1,5
-Trans béta ocimène : trace à 1
-Octanone : 0 :
-Camphre: 6 à 8
-Linalole : 24 à 35
-Terpinène 10L.4: 1,5 à 5
-Acétate de lavandulyle : 1,5 à 3
-Lavandulol : 0,2 à 0,8
-Bornéole: 1,5 à 3
-Butyrate d’hexyle : 0

AROMATHERAPIE BUCCO-DENTAIRE (H.LAMENDIN)

Voici quelques exemples de prescription d’aromathérapie appliquée à des traitements externes de la muqueuse buccale (cela m’a, également, été demandé). Il s’agit de remèdes locaux, généralement adjuvants, mais aussi parfois curatifs (aphtes, notamment) (HE : huile essen­tielle: TM: teinture mère; CT: chémotype; HV: huile végétale: HA: hydrolat aromatique ). L’espèce botanique exacte est donnée (genre et épithète qualificative; par­fois la variété doit être précisée, ainsi que la spécificité biochimique). La mention HEBBD (huile essentielle botaniquement et biochimiquement définie) est accep­tée par les pharmaciens.

Éruptions dentaires: (enfants ou adultes)
-HE Eugenia caryophyllus (clou de girofle) : 0,2 ml
-HE Lavandula latifolia (lavande aspic) : 0,5 ml HE Helichrysum italicum (immortelle) : 0,5 ml HV Hypericum perforatum (millepertuis) : qsp 30 ml chez les nourrissons et enfants, avec un doigtier, appliquer ce mélange sur la gencive, avec un léger massage. (1,2,3).
-HE Mentha piperata (menthe poivrée) : 1 ml HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon) : 1 ml HE Eugenia caryophyllus (clou de girofle) : 0,5 ml HE Lavandula vera (lavande officinale) : 2,5 ml
pour l’adulte cette synergie, diluée à 6 % dans de l’HV de noisette (Corylus avellana) ou de millepertuis i Hypericum perforatum), est appliquée sur la gencive (1).
-HA Lavandula vera (lavande officinale)
-HA Chamaemelum nobile (camomille romaine)
-HA Thymus CT (thujanol, thym) ana: 100 ml de façon complémentaire, en bains de bouche, 3 fois par jour (1).

Gingivites: (parodontites chroniques)
HE Lavandula angustifolia (lavande officinale) : 0,5 ml
HE Eucalyptus citriodora (eucalyptus citronné) : 0,3 ml
HE Mentha piperita (menthe poivrée) : 0,1 ml
HE Helichrysum italicum (immortelle): 0,1 ml
HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon) : 0,1 ml
HV Hypericum perforatum (millepertuis) qsp: 10 ml
faire un massage local, deux fois par jour, avec cette composition (1,3).
HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon): 0,75 ml HE Melaleuca alternifolia (tea tree): 1,5 ml HE Salvia officinalis (sauge officinale): 0,75 ml HE Ravensara aromatica (ravensare) : 1 mlHE Gaultheria procumbens (gaul-thérie): 0,75ml
HE Mentha piperata (menthe poi­vrée) : 0,25 ml application de ce mélange 3 à 4 fois par jour (2\.

Parodontopathies : (parodontites sévères)
HE Thymus CT thujanol (thym) : 0,5 ml
-HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon): 1 ml
-HE Ravensara aromatica (ravensare) : .
0,5ml

-HE Melaleuca alternifolia (tea tree) : 1,5 ml HE Listea citrata (litsée citronnée) : 1,5 ml
application de ce complexe avec un coton tige ou mas­sages gingivaux (1).
-HE Eugenia caryophyllus (clou de girofle) : 0,75 ml HE Lavandula hybrida (lavandin abrial) : 1 ml HE Melaleuca alternifolia (tea tree) : 1 ml HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon) : 0,75 ml HE Ravensara aromatica (ravensare) : 1,5 ml
en application 3 à 4 fois par jour (2).
-HE Melaleuca alternifolia (tea tree) : 3 ml
-HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon) : 3 ml
-HE Commiphoa myrrha (momol, myrrhe) : 2 ml
-HE Helichrysum italicum (immortelle) : 1 ml
-HE Eugenia caryophyllus (clou de girofle) : 1 ml
-HV Calophyllum inophyllum (calophylle inophylle) :20
ml
-HV Hypericum perforatum (millepertuis) : 80 ml
à instiller dans les poches parodontales (2,3).
-TM Calendula officinalis (souci officinal) : 15 ml
-HA Cistus ladaniferus CT pinène (ciste)
-HA Lavendula vera (lavendula officinalis)
-HA Mentha piperata (menthe poivrée) ana: 100 ml
en bains de bouche 3 fois par jour, de surcroît (1). Aphtes: (lichen buccal)
-HE Ravensara aromatica (ravensare) : 5 ml HE Melaleuca alternifolia (tea tree) : 5 ml HE Lavandula vera (lavande officinale) : 3 ml

-HE Commiphoa myrrha momol (myrrhe) : 2,8 ml
-HE Laurus nobilis (laurier d’Apollon) : 0,2 ml
-HE Calophyllum inophyllum (calophylle inophylle) qsp :
30ml 2 gouttes, en application sur les lésions toutes les 2 heures (2,3).

Je n’ai pas expérimenté ces remèdes, personnellement. Mes sources sont: D. Baudoux, pharmacien aromatologue. Ghislenghien, Belgique (1); R. Lhermite, odon­tologiste, DCD, Avignon (2) ; G. Toscano, pharmacien, DU de Phytothérapie, Miramas (3).

Si vous connaissez déjà ces traitements et les utilisez ou si, suite à cet article, vous les essayez, merci de me tenir informé de vos résultats et observations.

POUR EN SAVOIR PLUS
Ceux que le sujet intéresse particulièrement, ont notamment la possibilité de consulter cette publication: Lamendin H., Toscano G. et Requirand P. – Phytothérapie et aromathérapie bucco-dentaires. Encyclopédie médi-cochirurgicale (Dentisterie), 1, 179-192, 2004.
Sachant que l’on ne soulage pas des troubles ou lésions, mais les individus qui en sont atteints (lesquels sont « chacun unique »), pour des indications apparemment semblables (ce qui ne veut pas dire identiques), les résultats peuvent être très différents, voire inexistants. C’est pourquoi, afin de choisir les plantes les plus appropriés, il serait souhaitable de pouvoir faire appel à la protéo-mique qui étudie l’action des médicaments sur les pro­téines: raromathérapie, comme aussi la phytothérapie, trouvant leur place, dans le cadre de cette action sur le protéome. Cette méthode est proposée par Pierre Requirand (professeur honoraire de la faculté d’odon­tologie de Montpellier), auprès duquel on peut se rap­procher pour plus ample informé.

En ce qui concerne les HE employées en diffusion atmosphérique, se reporter à l’article publié à ce propos in le CDF n° 1185. De plus, certains d’entre vous se sou­viennent peut être que lors du congrès de l’ADF 2004, au stand Pfizer se trouvait un «bar à oxygène», infusé de différents cocktails d’huiles essentielles naturelles. A titre indicatif, en voici les compositions : pin de Sibérie, menthe verte, menthe poivrée, ravensara anisée ; lavan­din, pin sylvestre, thym doux, ciste ; ravensara aromatica, citron, pin sylvestre, eucalyptus radiata; citron, eucalyptus globulus, menthe poivrée ; ravensara aro­matica, niaouli, thym doux, citron et clou de girofle. •

(*) ingénieur ayant organisé des unités industrielles d’extraction
d’huiles essentielles en France, Espagne et au Maroc.
(**) Dr. es se., DSO, de l’Académie nationale de chirurgie dentaire.
LE CHIRURGIEN-DENTISTE DE FRANCE N’ 1225 DU 22 SEPTEMBRE 20OS