L’Académie de Médecine s’oppose au remboursement des médicaments homéopathiques

L’Académie nationale de médecine réclame le déremboursement total des produits homéopathiques comme cela se pratique dans beaucoup de pays, notamment européens.

L’Académie, instance conseillère des pouvoirs publics, “estime qu’il faudra exiger la démonstration d’activité de ces produits comme le font tous les laboratoires diffusant des médicaments en France”, mardi dans une communication.
Déja, dans un rapport qu’elle avait “voté à l’unanimité en 1987”, l’académie soulignait que “les produits homéopathiques devraient être soumis au droit commun qui régit l’industrie pharmaceutique”.
Cette mesure a été déjà été prise en Italie, en Espagne, en Finlande, en Suède, en Norvège, en Irlande, et depuis tout récemment, fin 2003 en Allemagne, soulignent les académiciens qui jugent “aberrant” le maintien du remboursement en France.
“L’homéopathie est une méthode imaginée il y a deux siècles à partir d’à priori conceptuels dénués de fondement scientifique. Elle a vécu jusqu’à maintenant comme une doctrine à l’écart de tout progrès, complètement en dehors du remarquable mouvement scientifique qui a bouleversé la médecine depuis deux siècles”, écrit-elle dans un texte adopté fin juin (avec seulement 2 voix contre et 4 abstentions).
“Il est compréhensible que la vente de ces préparations soit autorisée au moins dans la mesure où elles ne sont pas toxiques”, poursuit le texte rédigé par Maurice Guéniot, au nom de la commission II (thérapeutique, pharmacologie, toxicologie).

Pour l’Académie, ces produits ne correspondent en rien à la définition du médicament: pas la moindre molécule active mise en évidence à l’issue des dilutions, pas de succession d’essais pharmacologiques ou cliniques ayant fourni la preuve de leur “intérêt thérapeutique”.
“Dans le cadre de la réforme actuelle de la Sécurité sociale française, cette mesure de suppression de la prise en charge de l’homéopathie viendrait donc à son heure”, ajoute l’académie qui rappelle n’être “pas seule à le demander”.
“Dans les années passées, la Commission ministérielle de la Transparence avait voté à l’unanimité cette demande et ceci à deux reprises à plusieurs années d’intervalle”, précise-t-elle.
Selon Maurice Guéniot, l’Académie de Médecine, “demande aux pouvoirs publics de mettre fin au remboursement des produits homéopathiques au regard qu’ils n’ont pas apporté la preuve de leur intérêt thérapeutique, relançant le débat sur cette question.”
“Il est compréhensible que la vente de ces préparations soit autorisée au moins dans la mesure où elles ne sont pas toxiques et ne constituent donc pas un danger pour le consommateur ; et dans un pays comme le nôtre avec sa tradition de liberté il n’est pas question d’entraver leur fabrication et leur commercialisation ; encore faut-il ajouter que celles-ci s’accompagnent souvent d’une publicité plus ou moins intéressée, ce qui est une dérogation à la situation habituelle dans le domaine de la santé”, souligne le rapport de Maurice Guéniot qui vient d’être rendu public. Selon lui, les préparations homépathiques ne répondent en rien à la définition du médicament ni dans leur nature ni dans leur destination.
“Elles sont produites par une successions de dilutions allant jusqu’à l’échelle centésimale : à ce niveau nos moyens d’investigation ne permettent plus la mise en évidence d’une seule molécule de la substance originelle”, explique-t-il.
“En dépit de cet obstacle majeur, la plupart des produits homéopathiques sont présentés abusivement comme efficaces dans des secteurs variés, ce qui les placent dans une illégalité totale. En effet, le Code de la santé spécifie qu’un médicament doit présenter un “intérêt thérapeutique” ; et la preuve de cet intérêt doit être fournie par une succession d’essais pharmacologiques et cliniques, y compris des comparaisons en double aveugle”, ajoute-t-il.
L’Académie de médecine estime qu’il faudra exiger la démonstration d’activité de ces produits comme le font tous les laboratoires diffusant des médicaments en France, reprenant un rapport qu’elle avait voté à l’unanimité en 1987.
Elle critique aussi les indications très vagues ou très générales sous la formule fréquemment employée de “médicament homéopathique traditionnellement indiqué dans…”, dans des situations très larges comme les “troubles digestifs”, par exemple.
L’Académie juge donc “aberrant” le remboursement de ces produits par la Sécurité sociale à une période où, pour des raisons économiques, on dérembourse de nombreux médicaments classiques pour insuffisance (plus ou moins démontrée) du service médical rendu.
Les autres pays européens n’ont pas attendu, fait-elle remarquer. Ainsi, fin 2003, le gouvernement allemand a décidé de supprimer le remboursement des médicaments homéopathiques par les Caisses de maladie. Mais c’était déjà le cas en Italie, en Espagne, en Finlande, en Suède, en Norvège et en Irlande.
Dans les années passées, la Commission ministérielle française de la Transparence avait voté à l’unanimité cette demande et ceci à deux reprises à plusieurs années d’intervalle, rappelle-t-elle.

LE SYNDICAT NATIONAL DES MEDECINS HOMEOPATHE CONTRE ATTAQUE

Le Syndicat national des médecins homéopathes français (SNMHF) ne décolère pas face à la position de l’Académie de médecine qui a jugé “aberrant” le remboursement des préparations homéopathiques, ces produits n’ayant pas fait la preuve de leur efficacité.

Pour la défense de l’homéopathie, le syndicat rappelle qu'”un nombre considérable de publications scientifiques et de travaux de recherche ont conclu à l’efficience et à son efficacité”. L’homéopathie est également “une pratique reconnue” par l’Ordre des médecins, rajoute-t-il.

Le syndicat souligne qu’il appartiendra à la future Haute autorité de santé née de la réforme de l’assurance maladie de se prononcer sur le remboursement de l’homéopathie sur “la base de travaux et d’études validés et non sur des a-priori”. C’est aussi l’avis du ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy./yg

Lundi 06 septembre 2004 – Copyright © APM-Santé – Tous droits réservés