La Prescription d’Antibiotiques en Parodontologie

Dans les années 1960, on pensait que seule la quantité de plaque dentaire déclenchait de manière non spécifique la pathologie parodontale. Depuis les années 1970 n, nombreuses furent les études consacrée à la microbiologie de ces maladies. la découverte de l’association étroite : parodontite juvénile + Actinobacillus actinomyctemecomitans (Aa), a longtemps entretenu l’idée que l’on pouvait arriver à identifier pour chacune des entités parodontales des pathogènes spécifiques, avec pour corollaire la possibilité d’un traitement antibiotique ciblé à chaque fois.
Aujourd’hui le problème ne se pose plus en ces termes. Les poches parodontales renferment en effet une flore anaérobie extrêmement riche : 200 à 300 espèces à l’état quiescent qui sont loin d’être toute identifiées. A l’état actif, il y augmentation quantitative des germes présents mais heureusement simplification qualitative : le nombre d’espèce diminuant, certaines d’entre elles deviennent prédominante.
C’est ainsi qu’on est parvenu à identifier une quinzaine de pathogènes qui apparaissent d’avantage impliqués que les autres dans les parodontopathies destructives.
Selon les études et selon les diverses maladies parodontales, on retrouve habituellement un flore composée par quelques une s de ces bactéries en proportion variables . Cependant, il s’avère que ces germes sont incapables de provoquer une mono-infection et doivent agir en association . Ces compositions polybactériennes sont d’autant plus difficiles à cerner et à évaluer qu’interviennent également les notions de pouvoir de virulence de seuil de pathogénicité, de coopération, de variabilité génétiques et de bactéries protectrices
Seuls les antibiotiques antibiotiques actifs sur les pathogènes suscités intéressent le parodontologiste. Mais, outre le spectre d’action, il faut aussi prendre en compte les notions de bactéricidie ou de bactériostase, de diffusion osseuse, salivaire et surtout créviculaire, de résistance bactériennes et d’effet secondaires.
Enfin l’antibiothérapie pourra être générale ou locale.

I Antibiothérapie par voie générale
Elle ne se conçoit qu’en complément d’un débridement chirurgical (surfaçage radiculaire ou lambeau d’accès)

Les tétracyclines
Longtemps considérées comme l’antibiotiques de choix en parodontologie e, raison de leur large spectre et surtout de leur action éradicatrice sur Aa, dans les PAJ, leur usage trop fréquent a induit l’apparition de nombreuses résistances. ceci ajouté à leur action uniquement bactériostatique et à leurs nombreux effet secondaires , fait que les tétracyclines ont vu leur indications considérablement amoindries. En dehors de la PAJ ou elle restent encore des molécules de première intention, elle ne constituent plus dans les autres cas de figures qu’une alternative à d’autres traitements.
Il ne faut pas pour autant enterrer les tétracyclines trop rapidement. En effet, ces antibiotiques possèdent à côté de leur action antibactérienne des propriétés additionnelles identifiées récemment et encore mal exploitées : inhibition des collagénases bactériennes, action anti-inflammatoires, inhibition de la résorption osseuse et stimulation de l’adhésion fibroblastiques des surfaces radiculaires qu’elles imprègnent, pour en être très progressivement relarguées dans le sulcus. A ce titre, les tétracyclines pourraient être employées comme adjuvant à la régénération des tissus parodontaux (os, tissus conjonctifs) notamment en cas de greffe osseuse.

Le métronidazole
à la posologie de 750 mg / jour le métronidazole est actif sur la plupart des anaérobies strictes Gram – (Pgn Pi, Fn Bactéroïdes) et des spirochètes . En revanches son activité est plus relative sur les aérobies -anaérobies facultatifs. C’est pourquoi, à moins d’avoir identifié une flore sensible le métronidazoles n’apparaît pas comme un antibiotique idéal en monothérapie en parodontologie.

Les pénicilines
Ces antibiotiques bactéricides de la familles des bêta lactamides sont ceux dont le spectre d’action (et tout particulièrement celui de l’amoxyciline) correspond le mieux aux pathogènes rencontrés lors des maladies parodontales . malheureusement, beaucoup d’entre eux élaborent des bêta-lactamases, véritables anti-pénicillines qui inactives ces dernières.
Cette difficultés a pu être contournée en couplant à l’amoxyciline un inhibiteur des bêta-lactamase bactérienne : l’acide clavulanique. cette association (Augmentin (r)), administrée à la posologie de 1,5 g d’Amoxyciline + Acide Clavulanique par 245 heures en 3 prises restaure la pleine activité de cette dernière sur les germes producteurs de bêta-lactamases.

Vis à vis des pathogènes non-producteurs, l’action de l’amoxyciline se trouve potentialisées simplement parce que n’étant plus partiellement inactivés par les bactéries productrices de bêta-lactamase, la concentration d’amocycline active redevient maximale. Ceci se traduit par l’abaissement de l’CMI 90 d’amoxiciline nécessaire à l’éradication des germes sensibles. Actuellement, il y a un consensus pour affirmer que l’association amoxiciline / acide clavulanique est active sur la majorité des pathogènes parodontaux, en particulier dans les parodontites réfractaires traitées préalablement sans succès par les tétracyclines. Son action permettrait notamment dans ce type d’indication, d’éradiquer Pg des poches parodontales pendant au moins trois années mais également Aa, et cela, aussi puissamment que les tétracylines selon une étude récente in vitro.
Une autre solution possibilité est l’association amoxycilline / métronidazole. Le spectre d’activité seraient identique à celui de l’association précédente. l’activité sur les parodontites avancés, à progression rapide et réfractaire est tout aussi satisfaisante avec une éradication de de Aa et de Pg sur au moins 3 années.
La posologie recommandée est de 250 mg de métronidazole et de 375 mg d’amoxyciline 3 fois par jour pendant une semaine. Notons toutefois que le métronidazole provoque de nombreux effets indésirables qui s’ajoutent à ceux de l’amoxicilline, alors que l’acide claviculaire est parfaitement toléré, Pour cette raison, il semble plus logique de préférer en première intention et à efficacité égale, l’association amoxicilline -acide clavulanique.

Les macrolides
L’érythromycine et la spiramycine (Rovamycine)(r)) sont les deux molécules les plus couramment employées de cette famille. Elles possèdent une certaines efficacité qui permet une amélioration des signes cliniques et bactériologiques. La spiramycine apparaît comme la plus actives grâce à sa concentration importante et prolongée dans le fluide gingival. En association avec un surfaçage radiculaire, elle permet une réduction de la profondeur des poches sur une période dépassant 24 semaines dans les parodontites chroniques avancées. Toutefois, son action sur Aa reste limitées. Selon Fosse et Al l’efficacité in vitro de la spiramycine sur Aa calculées en terme de CMI 90, serait supérieure à celle des nitroïmidazolés, légèrement inférieure à celle de la péniciline G et très largemente n dessous de celle des tétracyclines et de l’amoxicilline (avec ou sans acidce clavulanique). L’association spiramycine-métronidazole (Rodogyl (r)) a donc été employée pour améliorer les résultats partiels de ces deux molécules prises séparément; MalheureusemenT, elle ne donne par d’effet synergique notable. On observe néanmoins un effet additif in négligeable.
La clindamycine (Dalacine (r)) macrolide apparenté de la famille des lincosamides, a été galement testée pour son activité e==e reconneu sur les anaérobies. Aa semble cependnat relativement résistant ce qui associé a des effets indésirables digestifs non négligeables en limite l’emploi.
Les macrolides apparaissent donc comme des anti-biotiques de seconde intention en parodontologie. L’association spiramycine métronidazole semble plus performante.

II Antibiothérapie par voie locale
Cette forme d’administration fait l’objet d’un véritable engouement depuis une dizaine d’année en Parodontologie.
L’intérêt de la voie locale par apport à la voie systémique et de minorer considérablement l’émergence de résistance tout en limitant les effets secondaires. D’autres, par le principe actif est régulièrement diffusé tandis que la voie générale est tributaires de prises trop souvent mal réparties dans la journée sans parler de la nuite; Enfin, les doses nécessaires sont plus faibles pour une concentration pharmacodynamique dans le fluide gingival jusqu’à 75 fois plus forte. (L Dubreuil 1994).
Les inconvénients outre le surcoût son liés à la natures des supports employés.
-Non Résorbables (fibres pleines ou creuses), ils génèrent des irritations et des douleurs locales et interfèrent avec la cicatrisation. Ils nécessitent du temps pour leur mise en place ainsi que pour leur dépose dans une séance ultérieure rendue indispensable. Enfin, malgré l’utilisation de colle cyano-acrylate, préconisée par Goodson et al. pour les maintenir en place ils sont perdus pour 25% au bout de 10 jours.
-Résorbables : ils ne présentent pas ces inconvénients mais ne permettent pas en revanche d’estimer correctement la durée réelle du contact antibiotique / micro-organismes pathogènes La forme gel nécessite pour sa mise ne place l’utilisation de seringues susceptibles de transmettre une contamination bactérienne d’un site à l’autre. C’est pourquoi le meilleur support semble actuellement constitué par des compresses de collagène biocompatibles protégeant le caillot sanguin et favorisant la cicatrisant.
Les antibiotiques ainsi délivrés sont pour l’instant des tétracyclines et dérivés (Minocycline) et le métronidazoles ils permettent d’obtenir , dans les parodontites de l’adulte des résultats favorables à 3 mois en ternes de réduction de profondeur des poches et de diminution du saignement au sondage , dans la mesure où ils sont associés localement à un surfaçage radiculaire.

Aucune étude n’a montré jusqu’à maintenant l’intérêt d’un usage local pour les pénicillines et les macrolides. En revanche, l’utilisation des seuls antibiotiques locaux, sans surfaçage radiculaire, donne de moins bon résultats que le surfaçage radiculaire seul s’il s’agit du métronidazole ou de la tétracycline.

L’étude de Pavici ( J Clin. Perio. 1994) comparant les résultats obtenus avec des fibres creuses de tétracycline, un gel de minocycline et un gel de métronidazole (Elyzol(r)) semble conclure vers l’obtention d’un effet supérieure avec des fibres de tétracycline. Sans doute, ces bons résultats sont-ils à mettre au crédit des propriétés adjuvantes des tétracyclines (anticollagénase etc..) déjà évoquées plus haut.

Modalités de prescription des antibiotiques en parodontologie

A la lumière des données qui précèdent, on voit bien que l’idée qui consistait à traiter chaque parodontite par une antibiothérapie systémique a vécu. les parodontites étant induites par des association =s de plusieurs pathogènes, elles nécessitent une antibiothérapie à large spectre. . En première intention, on prescrira le plus souvent les associations amoxiciline-acide clavulanique et amoxiciline métronidazole ; les tétracyclines ne constituent plus désormais (sauf en cas de PAJ) qu’une molécule de seconde intention.
Quand les circonstances cliniques contre-indiquent ces anti-biotiques (grossesses, résistances, allergies), on pourra avoir recours en remplacement aux macrolides, qui seront cependant moins efficaces. Le métronidazole en monothérapie ne peut convenir que dans les cas ou la flore, préalablement identifiée , est sensible à cet anti-bactérien.
L’objectif n’est donc plus aujourd’hui de déterminer l’antibiotique le plus spécifique de la parodontite à traiter mais plutôt de tenter de limiter au strict minimum la prescription systémique d’antibiotique s à larges spectre , ceci afin de contenir l’émergence croissante des résistances bactériennes génétiques acquises qui viennent rétrécir chaque années davantage le spectre d’action des antibiotiques actifs sur les pathogènes parodontaux.
Ce problème qui prend des proportions alarmantes est parfaitement illustré par la diminution constante de l’efficacité des tétracyclines et par le nombre croissant de bactéries capables de synthétiser des bêta-lactamases. (50% des souches de Prevotella Intermedia à l’heure actuelle selon Machino P, Yamamoto Y, Slots J).
En pratique, il y a aujourd’hui un consensus pour affirmer qu’il n’est nul besoin d’une antibiothérapie dans les gingivites, dans la très grande majorité des parodontites chroniques de l’adulte et mêmes dans les manifestations aiguës (abcès parodontal, gingivites et parodontites ulcéronécrotiques), lorsqu’il n’y a pas de manifestations générales.
Dans ces cas de figures, le débridement mécanique associé à la motivation à l’hygiène, aux bains de bouche voire aux irrigations sous gingivales à la cholorexidine et un suivi rigoureux sont suffisants.

Dans les parodontites chroniques de l’adulte, l’antibiothérapie locale peut cependant être utile pour optimiser les résultats du détartrage surfaçage radiculaire.
L’antibiothérapie systémique sera réservée en complément du débridement mécanique.
-Aux atteintes parodontales aigues avec signes régionaux (adénites) et/ou généraux (fièvres, asthénie)
-aux parodontites précoces (parodontites prépubertaires, juvéniles, localisées ou généralisées et à progression rapide)
-aux parodontites réfractaires
-aux interventions chirurgicales faisant intervenir des techniques de greffe osseuses ou de régénération tissulaires guidées, les gains d’attaches étant significativement augmenté en présence d’une antibiothérapie.

Bien entendu, la lutte contre l’émergence des résistances bactériennes acquises ne fait pas seulement appel à la notion de suppression des prescriptions inutiles mais passe également par le respect des autres règles générales de prescription des antibiotiques (posologies optimales, préférences à efficacité et toxicité égales aux molécules les plus anciennes, spectre le plus étroit possible, etc…).

(Source extrait du Chapitre II de « Prescription en Odontologie par Pilippe Casamajor et Claude Ugly – 1997)