Traitement prometteur contre la carie

Les travaux d’une équipe de chercheurs suisses ouvrent la voie à une médication génétique.

Elles étaient, pensait-on, définitivement vaincues. «Elles», ce sont les caries, dont le nombre a chuté de façon spectaculaire depuis quinze ans en France. Mais aujourd’hui, la situation n’évolue guère. Elle risque même de s’aggraver, à l’avenir, pour certaines tranches d’âge. Ainsi, 80% des jeunes de 15 à 18 ans en sont atteints et «le bénéfice acquis chez les enfants scolarisés est en partie perdu à l’adolescence», s’alarme le Dr Robert Regard, du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes. D’où l’intérêt des travaux d’une équipe de chercheurs suisses, publiés récemment dans la revue scientifique Nature, et qui ouvrent la voie à un traitement génétique de cette affection.

Car des caries, il en existe plusieurs types, plusieurs origines. Un véritable cercle vicieux, de nombreux facteurs intervenant au cours de ce phénomène complexe: l’apport de sucre, la composition et le flux de la salive, l’hygiène dentaire, le mode de vie… A la source de tout cela, il y a l’attaque d’une bactérie, le streptocoque Mutans. Deux médecins de l’Institut Karolinska, en Suède, ont donc eu l’idée d’inhiber le mécanisme d’action de ce germe, principal responsable de la carie. Comment? Ils ont utilisé l’une des 300 bactéries de la flore buccale, le lactobacille, dans laquelle ils ont introduit un nouveau gène, qui lui confère la capacité de tuer ce streptocoque. Puis ils ont testé leurs manipulations sur des rats en les nourrissant pendant trois semaines avec une boisson très sucrée. Les résultats des premiers essais sont prometteurs: chez les rongeurs porteurs du gène muté, le nombre de caries est, en effet, réduit de 40% par rapport au groupe témoin. Faut-il pour autant oublier les règles d’hygiène élémentaires? «Même si la thérapie génique est une bonne parade à la carie, l’idéal est d’abord de ne pas en avoir», remarque Robert Regard, qui attend des pouvoirs publics une meilleure politique de prévention. Sans quoi, le pire est à craindre. Notamment pour les personnes âgées, que l’absence totale de prophylaxie réduit à l’état de «laissés-pour-compte, dont la dégradation de l’état bucco-dentaire est dramatique», souligne Robert Regard.

L’Express du 29/08/2002
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Traitement prometteur contre les caries
par Marie-Charlotte Mano