Rôle de la progestérone dans la pathologie parodontale chez la femme enceinte

La progestérone est une hormone que l’on trouve en plus grande quantité dans le sang et les tissus de la femme enceinte. Chez la femme enceinte les taux d’њstrogène, de progestérone, sont 10 à 30 fois plus élevés que pendant le cycle menstruel. Comment ces hormones peuvent elles agir sur le parodonte ?
– la progestérone agit sur le processus de l’inflammation. Elle augmente la perméabilité des vaisseaux qui peuvent alors laisser passer davantage de cellules de défense combattant les bactéries .La réaction inflammatoire est de ce fait exagérée.
– les oestrogènes diminuent la kératinisation (la couche cornée) de la gencive. La barrière à l’agression des bactéries est donc moins efficace.
On sait aussi que les hormones peuvent réduire la production d’anticorps par les cellules de défense appelées lymphocytes .Les bactéries vont avoir tendance à se développer plus rapidement chez la femme enceinte .On a relevé un taux 55 fois plus élevé chez la femme enceinte d’une bactérie très nocive pour le parodonte, appelée Prévotella intermedia.
L’imprégnation hormonale au cours de la grossesse est à l’origine d’une augmentation de la prévalence de la maladie parodontale et en particulier de la gingivite gravidique.(10). Chez les femmes enceintes : Le taux de progestérone est accru de 10 à 30%. Les hormones, par leurs effets multiples, augmentent la prévalence des gingivites de 35% chez la femme, dès le deuxième mois de grossesse. (11)

Au cours de sa grossesse, la future maman doit particulièrement prêter attention à sa santé bucco-dentaire.
En effet pendant cette période de la vie, les risques de gingivite c’est-à-dire d’une inflammation des gencives, augmentent de 35%. Les variations hormonales sont les principales responsables de ce danger. Chez la femme enceinte en effet, le taux élevé de progestérone développe la perméabilité vasculaire et augmente la vulnérabilité des tissus aux agents responsables d’inflammation.

Dans la gingivite gravidique de la femme enceinte, on peut remarquer que ce taux élevé de progestérone inhibe la production de métalloprotéinases de la matrice (MMPs), des enzymes protéolytiques qui sont responsables de la destruction de collagène (1)
On s’est également aperçu que la progestérone réduit la production d’Interleukine IL-1a et b des médiateurs de l’inflammation bien connu dans l’induction de résorption osseuse en stimulant les ostéoclaste. Toutefois la progestérone, contrairement à l’њstradiol ne diminue pas le chimiotactisme des neutrophiles (4) En fait la Progestérone et l’Oestradiol favorisent indirectement la production de PGE2, qui sont connus pour supprimer la production de IL-1 par les monocytes, IL1 qui est rappelons le activateur de l’ostéoclasie (2) (d’ailleurs remarquons qu’un ancien nom de IL-1b était “osteoclast activating factor”) L’interleukine IL-1 est produite également par les Lyphocytes B activés et par les macrophages et que les macrophages produisent également de la PGE2. On sait avec certitude que l’accroissement de l’activité des monocytes/ macrophages est associé à l’accélération des destructions parodontales (5) mais le rôle de l’interleukine IL-1 est plus complexe.
L’IL -1b peut induire la production de collagènase et de PGE2 à partir des fibroblastes gingivaux (6)
Le taux élevé de PGE2 sur les tissus gingivaux est mesuré dans les études par prélèvement de fluide créviculaire grâce à un kit d’immuno-essai que l’on peut trouver dans le commerce. Sur 22 femmes enceintes atteinte de gingivite gravidique, on s’est aperçu que statistiquement, le taux de PGE2 décroît au 2ème et 3ème trimestre qui suivent la thérapie parodontale. En revanche il n’y a aucune relation statistiquement vérifiable entre le taux de PGE2 du fluide créviclaire et les indices cliniques
-indices gingival
-profondeur de sondage
-indice de plaque
Mais le taux de PGE2 créviculaire est un paramètre fiable pour mesurer l’effet du traitement parodontal. (3)
Meijer van Putten JB. (8) a montré que l’Oestrogène et la progestérone semblaient induire une augmentation de l’inflammation gingivale en provoquant un phénomène vasculaire avec “gonflements et rougeurs”. La progestérone agit sur le processus de l’inflammation en augmentant la perméabilité des vaisseaux. De plus ils ont observé que ces hormones altéraient le micro-environnement des bactéries orales et que cela occasionnait une augmentation et des décalages de croissance au sein de la population bactérienne. D’autre part,” un taux élevé d’њstrogène (chez la femme enceinte) diminue la kératinisation de la gencive laissant passer ainsi plus facilement les bactéries, les acteurs cellulaires et les acteurs moléculaires dans le circuit sanguin. ” (9)

En connaissant précisément les phénomènes imunologiques qui se surajoutent à la présence bactériennes, les gingivites qui en résultent pourraient donc être évitées ou au moins minimisées en établissant un contrôle de plaque stricte afin de la maintenir à un faible niveau au commencement de la grossesse.(8)

SHEMA RECAPITULATIF
(d’après un document de l’UCLA – School of Dentistry de Los Angeles)

REFERENCES
(1) The Effects of Progesterone on Matrix Metalloproteinases in Cultured Human Gingival Fibroblasts Carol A. Lapp, Jennifer E. Lohse, Jill B. Lewis, Douglas P. Dickinson, Michael Billman, Philip J. Hanes, and David F. Lapp
(2) J Periodontol 1999;70:757-760.
Other acquired disturbances in neutrophil function may be nutritional, hormonal,
drug-induced, radiation-induced, viral, immune, and autoimmune. For example,
estradiol (but not progesterone) inhibits neutrophil chemotaxis (Miyagi et al.,
1992. J. Periodontol. 63:28-32).
(3) J Periodontol 2002;73:173-177
The Effects of Periodontal Therapy on Intracrevicular Prostaglandin E2 Concentrations and Clinical Parameters in Pregnancy
Funda Yalcin, Cansu Basegmez, Gulden Isik, Lacin Berber, Esti Eskinazi, Mahtaban Soydinc, Halim Issever, and Utku Onan
(4) (Miyagi et al.,
1992. J. Periodontol. 63:28-32).
(5) (McFarlane et al., 1990.J. Periodont. Res. 25:207-214).
(6) (Richards et al., 1988. Arch. Oral
Biol. 33:237-243; Richards et al., 1990. J. Periodont. Res. 25: 222-229).
(7) Dent Update. 2000 Oct;27(8):380-3.
Hormonal factors in periodontal disease.Soory M.
Division of Periodontology, Guy’s, King’s and St Thomas’ Dental Institute, London.
(8) Ned Tijdschr Tandheelkd. 1998 Nov;105(11):416-Links Female hormones and oral health Meijer van Putten JB.
(9) Dr Michel Benouaiche Président de la Société Normande de Parodontologie, Le Havre
(10) Abraham-Inpijn L et al.
(11) (11) Prise en charge de la femme enceinte en Odonto-Stomatologie
Courcier-Soustre Emmanuelle*, Manoutcheri Dominique**
* Docteur en chirurgie dentaire, Docteur d’Université en Sciences Odontologiques, ex Assistant de l’UFR d’Odontologie de l’université Victor Ségalen Bordeaux 2
** Docteur en chirurgie dentaire, Attachée de l’UFR d’Odontologie de l’Université Victor Ségalen Bordeaux 2.