Prévalence des maladies parodontales et leur problématique

En France, la prévalence des maladies parodontales ne pouvait jusqu’ici qu’être extrapolée d’études épidémiologiques régionales et d’études nationales menées dans les pays industrialisés, en particulier aux Etats-Unis.
Dans la période 2002-2003, l’enquête épidémiologique nationale NAPASES I a été conduite dans le cadre d’une collaboration entre l’Union Française pour la Santé Bucco-dentaire (UFSBD) et les Centres d’Examen de Santé de la CNAMTS. L’ensemble des données relevées souligne l’intérêt de la mise en place d’une stratégie nationale visant à prévenir et traiter les maladies parodontales car celles-ci constituent un problème de santé publique de par leur prévalence et leurs implications sur l’état de santé de nos concitoyens
Les maladies parodontales présentent une forte prévalence, puisqu’elles touchent plus de la moitié de la population adulte, et sont responsables en majeure partie des problèmes de perte de dents. Bien que les formes plus avancées soient moins fréquentes (moins de 10% de la population adulte), les formes précoces et modérées de parodontite destructrice sont particulièrement prévalentes et provoquent une inflammation chronique des tissus parodontaux, qui aboutit non seulement à la destruction et à la détérioration des tissus buccaux, mais également à une inflammation chronique systémique qui peut avoir des conséquences graves sur l’état de santé général.
Le déclenchement et la progression de la maladie parodontale sont à l’évidence modifiées par des facteurs locaux et généraux, dits facteurs de risque. Les facteurs locaux incluent les éléments favorisants, comme les restaurations iatrogènes. On estime qu’à l’heure actuelle :
-20 % des français sont atteint de parodontite sévère.
-4 % en santé
-49 % parodontite légère
-27 % parodontite modérée.
-5 à 20% de la population de malades systémiques portent des parodontites sévères
2 facteurs majeurs ont été récemment mis en évidence : le diabète, surtout chez les malades au métabolisme mal contrôlé, et l’abus du tabac.

Selon Jenkins WMM et Kinane DF “La prévalence de la gingivite est très élevée dans toutes les tranches d’âge, avec un pic à la puberté et un léger déclin pendant l’adolescence. La parodontite affecte occasionnellement quelques dents lactéales. La gingivite est fréquente chez les adolescents plus âgés, sans être cliniquement significative. Avec l’augmentation de l’âge, les pertes d’attache peuvent s’étendre et devenir plus graves. Un petit pourcentage de la population, mais qui augmente avec l’âge, souffre de destruction importante généralisée. Alors que la plupart des parodontites sont “chroniques”, les formes à progression rapide sont maintenant classifiées en tant que “parodontite agressive”. Des données épidémiologiques limitées montrent que, chez les adolescents, la parodontite agressive (anciennement parodontite juvénile) affecte environ 0,1 à 0,2 % de la population blanche et 2 à 3 % de la population d’origine africaine. La parodontite agressive localisée est 3 fois plus répandue chez les femmes caucasiennes que chez les hommes caucasiens et 3 fois plus répandue chez les hommes d’origine africaine que chez les femmes d’origine africaine. Dans certains pays où les normes d’hygiène se sont améliorées, la prévalence de la gingivite, et peut-être également de la parodontite précoce, semble avoir diminué par rapport aux décennies précédentes, bien que la diminution des gingivites à l’échelle de la population soit difficile à maintenir. Par contre, aucune preuve convaincante d’un déclin de la prévalence de parodontite avancée n’a été apporté, ce qui suggère qu’une fois la parodontite initiée par accumulation de plaque chez un patient susceptible, sa progression dépend alors en grande partie de réponse de l’hôte et des facteurs modifiants.” (Réalité Clinique 2003)
Concernant les adultes, on peut estimer que 70% des dents perdues le sont à cause de la parodontite.
L’importance de la prévalence des maladies parodontale est le fait de leur progression lente et insidieuse.
C’est ainsi que des lésions étendues ne deviennent apparentes que dans la deuxième moitié de la vie après un temps d’évolution de longue durée. Si la maladie n’est pas déjà trop avancée, le traitement est simple et le risque de récidive reste faible à condition que le patient maintienne une excellente hygiène, même après la fin du traitement.
Une des difficultés majeures dans la thérapeutique parodontale est la question de la prise en charge et la maintenance. La maintenance palliative consiste à prévenir, ralentir ou arrêter la progression de maladies parodontales chez des patients qui ne peuvent recevoir des soins adaptés par manque d’acceptation du traitement, pour cause de mauvaise hygiène non perfectible, ou qui ont une santé trop altérée (par exemple une déficience immunitaire) (Baehni et Tessier, 1994). Dans ce contexte, on a pu montrer qu’un groupe de patients recevant des soins professionnels tous les 15 jours ne présente pas de perte d’attache ni d’évolution de la maladie au bout de 2 ans. En revanche, un autre groupe convoqué tous les 6 mois présente une perte d’attache et des poches plus profondes. Cela démontre l’efficacité de ces mesures préventives. sur une longue durée, parfois avec une absence de motivation du patient (qui résulte bien souvent d’une absence de prise de conscience) il est parfois difficile de mener le traitement à son terme. Si l’on considère la situation dans le monde, malgré les connaissances actuelles, il semble que de nombreux pays ne pratiquent aucune prévention et ne traitent pas efficacement les maladies parodontales. L’OMS a donc impulsé la recherche de méthodes d’appréciation des besoins en soins; le PTNS (periodontal treatment need system), le PSE (periodontal screening examination) et le CPITN (community periodontal index of treatment needs) ont été créés pour évaluer les besoin réels des populations en traitement parodontal. La question de la maintenance est également à l’ordre du jour. Selon Wilson TG (Réalité Clinique 2003) “La maintenance parodontale a un rôle vital dans le maintien du parodonte et des tissus périmplantaires sains après la phase de traitement actif. Une visite de maintenance type inclut une séance de réexamen du dossier du patient et une mise à jour de son état dentaire et médical, un examen clinique complet (comprenant l‚évaluation des signes cliniques d’inflammation), le bilan et les modifications de l’hygiène orale, l’élimination des dépôts sus et sous gingivaux, et des modifications comportementales. La durée moyenne d’une visite pour un patient avec des antécédents de parodontite est d’une heure est l‚intervalle entre deux séances est de trois mois.” De toute façon, même chez un patient motivé au début, la compliance décroit. Selon une étude de l’Inserm (1999), après 3 ans, la moitié des patients trouvent difficilement supportables les soins interproximaux. Après 8 ans, seuls 16 % des patients poursuivent une maintenance…
Trente quatre pour cent ne reviennent pas après une phase active de traitement. De nombreux facteurs interviennent dans cette absence de motivation, dont la lassitude et le manque de temps. Wilson et co-auteurs précisent dans une étude portant sur 961 patients et s’étendant sur 8 ans, que la maintenance est bonne dans 16% des cas, irrégulière dans 49% et nulle dans 34% . Ces chiffres sont constamment retrouvés dans la littérarure, et sont parfois pires.
Une enquête de l’ADA a montré que 5% seulement des patients surveillés employaient la soie dentaire quotidiennement .
La bonne communication avec le patient est donc essentielle et à cet effet, l’utilisation des moyens multimédia peut
être une aide précieuse. Mais la relation soignant-soigné sera d’autant meilleure que ce dernier pourra parler de lui et être “compris” par le praticien. Quant à celui-ci , il lui incombera d’expliquer de façon simple ce qu’est la maladie parodontale, ses causes, son évolution, en cherchant, non à culpabiliser le patient, mais en insistant sur une “guérison” rendue possible grâce à la coopération du patient lui-même; trop souvent le praticien applique un programme de motivation standard, confié à l’assistante dentaire ou à un diaporama, cet enseignement pouvant être considéré comme peu gratifiant. Compte tenu de la place primordiale de la “réponse” du patient dans les décisions thérapeutiques et les résultats à moyen et long termes, l’enseignement des techniques de maintenance devrait au contraire faire l’objet d’un soin et de recherches particuliers.