Pénurie de dentistes en zone rurale

Avec seulement 643 dentistes répartis dans 450 cabinets, la Seine-et-Marne manque de praticiens, ce qui induit un ou deux mois d’attente dans les cabinets ouverts.

QUARANTE-SEPT dentistes pour 100 000 habitants contre 117 à Paris : la Seine-et-Marne est le département d’Ile-de-France le plus mal loti en matière de praticiens dentaires (juste devant la Seine-Saint-Denis avec un taux de 42 pour 100 000). C’est l’un des principaux enseignements du dernier rapport de la mission odontologique rendu il y a quelques jours au ministère de la Santé.

La Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) a donc décidé de tirer la sonnette l’alarme afin que l’accès aux soins dentaires ne relève pas bientôt du parcours du combattant en Seine-et-Marne. Des villages mais aussi de gros bourgs perdent progressivement leur spécialiste. A Nangis, au milieu des champs de betteraves, le docteur Poirier, 66 ans, prend sa retraite le 23 décembre. « Il en parle depuis un an. Mais il n’a toujours pas trouvé de successeur et son cabinet va fermer », soupire son assistante, bientôt au chômage à 58 ans. Mère de famille, Joëlle soupire : « Ça va être la galère trouver un remplaçant. Il nous suivait depuis 18 ans ! »
Pas de repreneurs après 95 % des départs Le même problème se pose à Longueville, à Provins, à Montereau. Parfois, les dentistes font du rab. Certains « anciens » s’accrochent comme Jean Sevestre… 72 ans ! Ce dernier bat des records de longévité : 40 ans à soigner les caries à Souppes, près de Nemours… « En continuant, je limite les dégâts, pour le cas où je ne vendrais pas. Et j’ai vraiment l’impression d’être utile », confie-t-il. Les campagnes sont aujourd’hui directement concernées par l’allongement des délais d’attente : de un à deux mois pour les nouveaux patients qui prennent rendez-vous dans des cabinets surchargés… Parmi les solutions, la CNSD suggère notamment la mise à disposition gratuite de locaux, voire de matériel lors d’installations dans les zones rurales désertées. En espérant la reprise des cabinets. « 95 % des praticiens qui partent à la retraite ne trouvent pas de repreneur et le cabinet ferme. A Provins ou Coulommiers, par exemple, cela pose des problèmes », reconnaît aujourd’hui Hervé Parfait, praticien à Chelles et président du conseil départemental de l’Ordre des dentistes. Selon lui, 160 étudiants sortent diplômés chaque année des universités parisiennes. Problème : la campagne ne les attire pas. « Ils s’installent à 80 % en Ile-de-France et surtout en ville, observe le dentiste. Ils sont sûrs d’y trouver des patients, du matériel neuf. Pour les jeunes diplômés, la campagne est ressentie comme un exil et pas assez attractive en terme de loisirs par exemple. »

Sophie Bordier
Le Parisien , lundi 15 décembre 2003