Après une avulsion dentaire, l’os alvéolaire résiduel subit des modifications qualitatives et quantitatives marquées : l’importance de la résorption de la crête pendant la phase de cicatrisation semble être inversement proportionnelle au niveau d’alvéolyse initiale. Après avulsion de dents atteintes de parodontite, chaque phase de la cicatrisation est plus longue (Kim et al. 2017). La corticalisation de l’entrée de l’alvéole et l’apposition osseuse sont particulièrement retardées par rapport aux sites non atteints de parodontite (Ahn & Shin. 2008). La préservation alvéolaire est une technique fiable pour minimiser la perte de volume de la crête à l’issue d’une avulsion. La littérature scientifique reste controversée sur son indication pour les dents présentant une perte osseuse sévère : certains auteurs rapportent que la préservation alvéolaire réduirait la résorption de la crête par rappor à la cicatrisation spontanée (Aimed 2018). D’autres auteurs indiquent que cette réduction de la résorption postopératoire est moins évidente et concerne principalement la largeur cervicale de la crête (Zhao et al. 2018) ou la hauteur de l’alvéole (Rasperini et al. 2010). L’hétérogénéité des biomatériaux et des techniques chirurgicales utilisés ainsi que la morphologie initiale des alvéoles peuvent expliquer les divergences rencontrées dans les études.

L’objectif de cette étude clinique contrôlée randomisée était d’analyser les modifications des alvéoles d’extraction de dents parodontalement compromises traitées par des techniques de préservation alvéolaire en comparaison à une cicatrisation spontanée. Une analyse volumétrique d’images 3D standardisées et des données histomorphométriques ont été réalisées.

Matériel et méthodes
• Cette étude clinique randomisée comprenait 26 patients présentant une parodontite de stade III/IV et nécessitant des avulsions uniques ou multiples de dents parodontalement compromises. Les dents étaient ensuite remplacées par une restauration implanto-portée.
• Un examen parodontal (charting parodontal), des radiographies péri-apicales, et une tomographie à faisceau conique (CBCT) ont été réalisés chez tous les patients. Une séance de thérapeutique parodontale de soutien était effectuée au moins une semaine avant l’intervention afin d’obtenir des indices de plaque et de saignement ≤25%.
• Les patients ont été répartis au hasard dans deux groupes :
– Groupe test (préservation alvéolaire – RP) : comblement des alvéoles avec un substitut osseux d’origine bovine contenant 10% de collagène (DBBM-C ; Geistlich Bio-Oss Collagen, Geistlich Pharma AG) et recouvertes d’une membrane collagénique (MB ; Geistlich Bio-Gide, Geistlich Pharma AG). – Groupe témoin (cicatrisation spontanée – SH) : aucun matériau ni sutures n’ont été utilisés.
• A 23 semaines : réalisation d’un CBCT post-opératoire.
• A 24 semaines (six mois) : mise en place de l’implant et prélèvement au niveau de la partie centrale de la crête pour l’analyse histomorphométrique.
• L’efficacité de la préservation alvéolaire a été évaluée en confrontant les modifications linéaires et volumétriques initiales et post-opératoires sur les images CBCT.
• L’évaluation histomorphométrique des échantillons a été faite à l’aide d’un logiciel numérique (Photoshop, Adobe, États-Unis). Pour chaque échantillon, le pourcentage d’os, de greffon résiduel et de tissu conjonctif a été mesuré.
• Le critère principal de jugement était la largeur de la crête. Les critères de jugement secondaires étaient la hauteur de la crête, les mesures volumétriques et les résultats histomorphométriques. Des tests non paramétriques ont été effectués pour l’analyse statistique


Résultats

• Vingt-six sujets nécessitant une avulsion et une restauration implanto-portée au maxillaire ou à la mandibule ont été inclus dans cette étude : 13 patients (18 alvéoles) dans le groupe RP et 13 patients (16 alvéoles) dans le groupe SH. Il y avait trois fumeurs par groupe.
• La largeur pré-opératoire des alvéoles n’était significativement pas différente entre les groupes.
• Largeur des alvéoles : à 23 semaines, les deux options thérapeutiques ont entraîné une réduction significative de la largeur de l’alvéole. La préservation alvéolaire (groupe RP) a atténué la résorption osseuse par rapport à la cicatrisation spontanée (groupe SH). La résorption était principalement au niveau cervical.
• Hauteur des alvéoles : les parois osseuses vestibulaires et linguales présentaient une résorption significative entre la situation initiale et la 23ème semaine. Cette résorption était plus sévère dans le groupe SH. Dans les deux groupes, la réduction de la hauteur de l’os vestibulaire était plus importante par rapport à l’os palatin/lingual. Au niveau des corticales palatines/linguales, la préservation alvéolaire a maintenu l’os de manière significative.
• Volume des alvéoles : la différence de volume moyenne entre la situation initiale et celle à la 23ème semaine était de -26,88 % dans les alvéoles RP et de -50,34 % dans les alvéoles SH. Elle était plus prononcée dans les zones coronaires.
• Dans le groupe SH, l’alvéolyse initiale était associée à une résorption plus importante de la crête. • Données histologiques: des quantités réduites d’os ont été trouvées dans les biopsies : 30,1% dans le groupe RP contre 53,9% dans le groupe SH. Dans les échantillons RP, de l’os nouvellement formé entourant les particules résiduelles de substitut osseux a été mis en évidence sans signe d’inflammation. Dans les échantillons SH, de l’os vivant constitué principalement de tissu osseux fibreux organisé en trabécules a été trouvé.

Source : https://www.efp.org/fileadmin/uploads/efp/Documents/JCP_Digest/jcpd21-87French2.6.pdf?fbclid=IwAR2KGhAsBDGjVjLSPr5KrvIO5fpTYApPw3U3jNCaMckOVL3RhoUvwMmZDcQ