#ADF2016 : La Bioimpression 3D au service de l’Odontologie

Est-ce la révolution technologique du xxie siècle? L’impression 3D est en tout cas souvent présentée comme telle. Elle remonte à 1986, quand l’ingénieur américain Charles Hull créa la première imprimante 3D selon le procédé de stéréolithographie : à partir d’un modèle numérique, un objet était construit par la superposition de fines couches de résine qui se solidifiaient là où passait un rayon ultraviolet guidé par un ordinateur. Cette révolution a aujourd’hui de nombreux domaines d’application, dont l’odontologie. Par exemple, elle permet de réaliser des modèles positifs de la perte de substance dentaire, des moulages ou des guides sur mesure que le chirurgien utilise pour préparer son intervention. Fabriquer des tissus biologiques fonctionnels tels que l’os relève encore de la science-fiction. Mais peut-être plus pour longtemps, grâce à la bio-impression 3D.

05-12-2016-18-49-42Le professeur Jean-Christophe Fricain, de l’unité médicale d’omnipratique dentaire du CHU de Bordeaux a présenté ses travaux dans la revue ADF Info du congrès de l’ADF 2016

Des structures osseuses peuvent être reproduites avec du titane ou des biomatériaux. Plus encore, une technique qui a émergé il y a dix ans environ,

La bio-impression 3D, vise à élaborer de véritables tissus biologiques tels que l’os : l’imprimante dépose, couche par couche ou point par point, non plus un matériau inerte, mais des cellules vivantes, des composants de la matrice extra-cellulaire et des biomatériaux.

Ici, pas de matrice d’échafaudage (scaffold) colonisée par les cellules après fabrication, mais une structure 3D qui se construit directement selon trois principes : biomimétisme (la structure reproduit le tissu à l’échelle microscopique), auto-organisation (les cellules se différencient de façon autonome), et modularité (des unités fonctionnelles s’assemblent).

Pallier le déficit d’organes et améliorer la fonctionnalité des prothèses.

La bio-impression 3D sert au premier chef à l’étude des interactions cellules-cellules et cellules-matrice, ou aux tests toxicologiques, à l’exemple du modèle hépatique de la société californienne Organovo. Cependant, son objectif ultime est de pallier le manque de fonctionnalité des prothèses et le déficit d’organes. Il s’agit de construire des tissus de telle façon qu’ils puissent devenir fonctionnels une fois implantés, avec l’aide de la « 4D », la dimension temporelle. Trois techniques d’impression biologique ont été développées. La plus courante parmi les machines commercialisées est la micro-extrusion : des cellules sont déposées par des micro seringues en alternance avec un hydrogel servant de matrice. D’autres techniques utilisent une « bio-encre », mélange de cellules vivantes, de matrice extra-cellulaire, de facteurs de croissance et de biomatériaux. Dans la technique du jet d’encre (comparable à celle des imprimantes de bureau), la bio-encre est projetée par de fines buses sur un support de culture, sous l’effet d’impulsions d’air chaud ou d’une pression piézoélectrique.

La première micro-impression expérimentale de ce type date de 1988. Trente ans après, il devient possible de fabriquer des produits d’ingénierie osseuse in vitro, voire de régénérer de la peau et du cartilage in situ.

Vers la régénération tissulaire

La bio-impression assistée par laser (LAB) est une autre approche prometteuse : un rayon laser piloté par ordinateur projette avec précision des milliers de gouttelettes de bio-encre sur le support de culture. L’unité Inserm 1026 « Bio-ingénierie tissulaire », que je dirige à Bordeaux, travaille particulièrement sur cette méthode (cf. figures 1 et 2).

Nous avons ainsi démontré que le motif d’impression réalisé oriente la communication entre les cellules et la cicatrisation.

Les recherches actuelles s’orientent vers la « LAB in situ », sur des modèles animaux. Elle imprimerait les composants cellulaires et matriciels à l’endroit même de la perte de substance, selon une organisation définie pour favoriser la régénération tissulaire. Appliquée à des patients, ce serait l’avènement, en somme, d’une bio-impression 4D in vivo!

En savoir plus sur http://www.biotis-bordeaux.com/